top of page

Bonne fête Papa !

  • Axelle MOANDA
  • 19 juin 2023
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 6 juil. 2024

- « Vous avez fait quoi dimanche ? J’imagine que vous lui avez organisé une belle petite journée pour fêter comme il se doit !

- Ah vous fêtez ça vous ?

- Pourquoi on ne le fêterait pas ?

- Non pour rien, mais tu sais…»


Voici un petit exemple des échanges que nous avons pu entendre aujourd’hui autour du café suite à la fête des pères.




Je ne reviendrai pas sur l’origine historique, culturelle et surtout commerciale de la fête des pères. J’aimerais saisir l’opportunité pour prendre le temps de faire un focus sur les échanges informels que nous avons tous les jours sur nos lieux de travail.

Tout d’abord, commençons par définir le terme.


1. Qu’est-ce qu’un échange informel ?


Ce sont l’ensemble des discussions décontractées que nous avons avec des collègues et parfois même des supérieurs hiérarchiques sur nos lieux de travail.

Vous savez, ces moments où nous parlons jardin, cuisine, éducation, cinéma, astrologie, etc. etc.


Ces échanges souvent fort agréables sont parfois pour ne pas dire souvent, le lieu d’expression des opinions de tout un chacun sur des thématiques diverses et variées.


Dis donc Axelle, pourquoi dis-tu cela comme si ce n’était pas une bonne chose ?

Moi ? Jamais je n’oserai voyons ! Quoi que… Il faut bien l’avouer, je pense que chacun et chacune d’entre nous a pu être fort surpris et surprise de ce qu’il ou elle entendait.

Entre la collègue qui n’est pas raciste mais bon… Force est d’admettre que la majorité des étrangers sont les auteurs de crime en France. Le collègue qui n’est pas sexiste mais bon on le sait femme au volant égal accident. Les « oh on ne peut plus rigoler ! » Les « tu as mis tes doigts dans la prise aujourd’hui ? » Ou encore les « non mais chez vous, vous faites ça ? Vous fêtez ça chez vous ? » etc.


2. Les conditions de travail des "minorités"


Ce sont aussi les espaces où les personnes dites provenant des « minorités » font le plus souvent face aux micro-agressions et à la violence ordinaire. Ces deux sujets feront l’objet d’un article plus long dans le cadre de la semaine de la qualité de vie et des conditions de travail. Je ne vais donc pas trop m’attarder dessus – pour l’instant –


Je vous mets juste là les définitions de ces termes :


- Micro-agression ; « des communications verbales, comportementales et environnementales quotidiennes, brèves et courantes, intentionnelles ou non, qui transmettent des messages hostiles, péjoratifs ou négatifs à une personne ciblée parce qu'elle appartient à un groupe stigmatisé. Bien que ces communications semblent généralement inoffensives pour les observateurs, elles sont considérées comme une forme de racisme dissimulé ou de discrimination quotidienne. »


- Violence ordinaire : terme plus difficile à définir. Ce sont les brimades, les petites humiliations, les conflits larvés…


Pour récapituler, ce sont ces petites phrases « sans importance », ces petits calembours, ces petites questions, ces remarques, que nous utilisons pour faire la conversation sans réaliser l’impact qu’elles peuvent avoir.


Je vous vois venir, « non mais on ne peut plus rien dire dans cette société de wokiste ! Heureusement que Coluche n’est plus là, il aurait été sidéré ! Pauvre France, mais pauvre France ! »

Prenons le temps de nous mettre à la place du collègue issu de ces « minorités ».


3. Cas « concret »


Reprenons l’exemple évoqué plus haut. Fabrice, 44 ans, d’origine Guadeloupéenne (ça importe pour la suite de l’article) revient de son week-end de fête des pères. Il a passé un merveilleux dimanche en famille. Il a fait beau. Ils ont fait un barbecue dans le jardin. Il est prêt à commencer la semaine en pleine forme.

Alors qu’il discute avec le sourire, voici ce qu’il entend :


- « Vous avez mangé quoi ? Un colombo ? Je suis sûr/sûre que c’était un colombo. J’adore ! J’ai la cousine de l’oncle de ma tante qui en fait un délicieux avec de la pomme et des raisins secs !

- Avec de la pomme et des raisins secs ?

- Oui, elle tient la recette de quelqu’un qui a vécu aux Antilles pendant 10 ans !

- Où aux Antilles ? Parce que j’en suis originaire et je n’ai jamais entendu parler de raisins secs…

- Non mais ça n’a pas d’importance où ! Guadeloupe, Martinique c’est pareil !

- Ah non, pour toi Bretagne et Pays de la Loire c’est pareil ?

- Oh, on ne va pas chipoter ! »


Je vais m’arrêter là parce que cet échange pourrait continuer éternellement. Revenons sur certaines de ces phrases :


Je suis sûr/sûre que c’était un colombo.

La recette de quelqu’un qui a vécu aux Antilles pendant 10 ans

Non mais ça n’a pas d’importance où ! Guadeloupe, Martinique c’est pareil !

Oh, on ne va pas chipoter !

Est-ce que vous arrivez à voir en quoi c’est problématique ? Non ? Oui ?

N’ayez pas peur de dire non, on est là pour apprendre.


Reprenons ces phrases une par une :

Je suis sûr/sûre que c’était un colombo => Présomption du plat à cause de l’origine de Fabrice. Les Bretons ne mangent pas des galettes tous les jours.

La recette de quelqu’un qui a vécu aux Antilles pendant 10 ans => argument utilisé pour empêcher Fabrice de remettre en question la recette.

Non mais ça n’a pas d’importance où ! Guadeloupe, Martinique c’est pareil ! => Pourquoi ce serait pareil ?

Oh, on ne va pas chipoter ! => Argument qui place Fabrice comme étant « hostile ».


Maintenant que cela est dit… Que faire ? Éviter de discuter pendant les pauses-café ? Ce ne serait pas une solution… Déjà prendre conscience et surtout accepter que nous ayons tous et toutes des préjugés. Ensuite, essayer d’être plus attentif et attentive à nos discours.

On aurait pu demander à Fabrice : « vous avez mangé quoi ? » plutôt que d’assumer dès le départ que c’était un colombo.

Cela permet d’améliorer les conditions de travail et de créer des espaces bienveillants et accueillants pour tous et pour toutes.

Comments


bottom of page